La Lorgnette Indiscrète

COMPTE-RENDU SUCCINT de la REUNION

« GAZ de SCHISTES »

Montmélian 11 février 21013

60 personnes présentes. Le CR est en noir et les commentaires de B. Masson en bleu.

2 présentateurs : Mr Jean Buisson et Mr Michel Levy, chacun développant une partie de l'exposé.

1°) Principes techniques de forage.

Un power-point permet la comparaison entre les extractions de gaz naturel prisonnier d'une « poche » (roche réservoir type sableux) et les extractions de gaz disséminé à l'intérieur même de roches (roches « mères »).

- Dans le premier cas l'extraction nécessite un forage généralement vertical et un pompage.

- Dans le second cas cette extraction impose une fracturation de la roche, par injection dans celle-ci d'eau sous pression chargée d'environ 600 produits parfois très nocifs à la nature, puis récupération du gaz ainsi libéré. Le forage vertical dans un premier temps, s'incurve et devient horizontal dans la couche exploitée.

      * Surface de 1 à 2 ha par forage !

      * 20 millions de l (20 000 m3) d'eau consommée par fracturation dont 20 à 80% sont récupérés.

       * Zone fracturée assez restreinte, ce qui nécessite une multiplication des forages.

       * Libération de sels par la roche fracturée contenant par exemple du radium-baryum (radioactifs)

RISQUES :

* fissuration et contamination de la nappe phréatique, risques de pollution des aquifères

* remontées de gaz extrait par des réseaux de micro-fissures naturelles.

* pollutions atmosphériques par émanations de méthane.

* émission de radioactivité.

* menaces de séismes : on compte environ 700 micro séismes pour une campagne de forage.

* risques de fuites importantes de gaz (7 à 8% du gaz extrait) lors de l'exploitation et du transport, entraînant des risques sanitaires pour les populations à proximité : Hydrogène sulfuré provoquant une perte de l'odorat, benzène (benzènémie élevée chez des patients) cancérigène.

*Épuisement des ressources en eau dû à de très fortes consommations.

* mitage des paysages donc des écosystèmes avec 1 forage tous les 1 à 4 km... !

*menaces sur l'agriculture et le tourisme. Commentaires : certes le tourisme (lui même source de pollutions et de nuisances importantes!) sera affecté..mais il faut, à mon sens, essayer de dépasser ces soucis purement économiques afin de porter notre attention sur les conséquences écologiques bien plus graves. Quant à l'agriculture (elle même très souvent source de pollutions chimiques terribles des sols), il faudrait insister sur la qualité des cultures voisines..et leur intégration dans les réseaux alimentaires !

* commentaires : il me semble que les atteintes aux écosystèmes sont catastrophiques avec cette fragmentation des paysages dont les conséquences atteignent tous les domaines de l'écosystème : de la reproduction des espèces à grand territoire, aux atteintes très sévères voire irrémédiables portées au sol à travers sa flore sa faune sa microfaune. Les atteintes simultanées par les polluants chimiques, le manque d'eau, les vibrations (camions..), le bruit, concourent à un véritable processus de désertification.

AVANTAGES :

* Création directe d'emplois : quelques centaines en plus (personnel spécialisé, lui, importé d'ailleurs)

*Création indirecte d'emplois : 10 000 ?

* Actuellement, la surproduction entraîne des baisses considérables des cours...de nombreuses entreprises sont en faillite (Le Monde du Vendredi 1 février : le gaz de schiste coûte cher aux pétroliers).

*Consommation de ressources locales ! Quel cadeau, doux euphémisme !!

2°) Cadre juridique et permis en France.

- C'est le code minier qui s'applique. Contrairement aux pays anglo-saxons, en France le sol appartient au propriétaire...mais PAS le sous-sol qui reste propriété de l'état. Le propriétaire du sol reçoit de compensations financières relativement faibles (taxe départementale et communale des mines, taxe foncière..dépendantes de la production de gaz).

-Les maires des communes concernées n'ont aucun pouvoir décisionnel...et sont même souvent bien tenus à l'écart des informations concernant les futurs travaux.

- Les permis autorisent :

* un droit d'exploration

* un droit d'exploitation

Suit une enquête publique et une étude d'impact. Dans quelle mesure, lorsque les intérêts en jeu sont considérables, en tient-on compte ?

3°) Etat en France.

- Les quantités sont limitées :

* 5000 Milliards (MM) de m3 selon Energy info Agency..;ayant déjà fait des erreurs en Pologne !

* 500 MM (estimation Conseil Général de l'environnement et Développement Durable). Cet oxymore est vraiment risible : un développement ne peut pas durer dans un monde limité!!!. Ce facteur d'estimation avec des marges d'erreur considérables montre le grand sérieux du travail.

* L'économie serait d'environ 10% de notre facture pétrolière soit environ 5MM/an. Quasi négligeable par rapport au PIB !

- Les surfaces sont restreintes

- En décembre 2012, 3 permis accordés ont été annulés : Nant, Montélimar, Villeneuve de Berg.

- 8 demandes ont été rejetées.

- Il reste 58 permis accordés : inadmissible...et 80 en cours d'instruction.Affaire à suivre.

1°) Les 3 zones principales concernées :

(malheureusement les cartes étaient quasi-illisibles et il fut très difficile de suivre les zones géographiques!)

- GEX : permis du 11-06-2009

* Valable jusqu'en 2014 (société eCorp): mais rien n'est fait pour le moment. (suspicion de démarchage à Viry en 2012).

* Extension : il concerne les départements de l'Ain, du Jura, de la Haute Savoie, où il atteint les ponts de la Caille près de Cruzeilles.

* Le problème est que rien n'est demandé « directement »...il s'agit de recherches d'hydrocarbure et non de fracturation !!! Ah nuances, nuances trompeuses !

* GEX sud : renouvelable ?

- MOUSSIERES : permis le plus « chaud » du 14/03/08

* Le permis (accordé à Celtic Energy Petroleum) est valable pendant 5 ans : il est donc à renouveler cette année...Il faut savoir que lors de cette opération, la surface éventuellement accordée est la moitié de la surface initialement autorisée, et passera donc de 3269Km2 à 1634,5 km2. De ce fait les zones qui atteignaient Billième et Yenne, ne seront plus concernées.

* Géologiquement parlant, la période concernée est le Trias-Jurassique (-250 Millions d'années environ à – 135 MA) se trouve une couche de grès bigarrés de 17m d'épaisseur...à près de 2000m de profondeur !!

* Une manifestation de protestation est organisée le 16 mars à Nantua.

- LONS LE SAULNIER. Blyes : renouvelable ?

- LYON-ANNECY : REJETE.

2°) Le permis « Préalpes 2011 »

- 1) Extension : Il s'agit d'une immense surface qui s'étire des Bauges (près d'Albertville) aux Hautes-Alpes (au Sud de Gap).

- 2) La zone ne touche pas bien sûr les massifs cristallins internes mais englobe les massifs « karstiques » où la circulation de l'eau est très caractéristique, augmentant considérablement les problèmes potentiels en cas de fuite.

3°) Que peut-on faire ?

- Adhérer à l'association : je pense, insister sur la nécessité d'une immense solidarité entre les habitants...et non seulement des zones concernées.

- Contacter les élus. Totalement inefficace, à mon propre sens, à moins de leur mettre une pression exemplaire.

- Participer aux débats sur la transition énergétique. À conditions d'y être véritablement écoutés, sinon créons nos propres structures !

- Participer aux manifestations. Cela suffira-t-il ?

Discussion :

Les questions furent bien diverses. Je n'en ferai pas le tour, et écarterai les questions purement techniques.

1) une dame a bien exprimé la nécessité de garder à l'esprit que ce « combat » est le même que celui contre le nucléaire...et bien d'autres. Je suis totalement en accord.

2) un homme a proposé de bien choisir sa banque : d'en choisir une solidaire... Malheureusement on entendait assez mal et je n'ai pu capter le nom de celle-ci

3) J'ai posé la question du respect des décisions du public...donc soulevé le problème de la fausse démocratie dans laquelle nous sommes...(lire Démocratie précaire d'Eric Fassin, ed la Découverte 2012).

4) questions sur les autres moyens d'action possibles.

Réflexions et conclusions personnelles :

Comme toute source d'énergie, celle évoquée s'accompagne de très fortes nuisances généralement irréversibles sur le fonctionnement des écosystèmes, de tous les écosystèmes, aucun n'étant à l'abri des circulations de polluants (air, eau). Cette source nous inquiète fortement vu :

- d'une part qu'elle se situe dans notre très proche environnement, nous mobilisera donc « égoïstement »... (contrairement aux puits de pétrole par exemple...qui sont loin de nous! Lire l'excellent livre : « un brin d'herbe contre le goudron » - de Maria Aguinda – collaboration de P Bèle ed Michel Lafon avril 2012).

• d'autre part du fait qu'elle soit une véritable injure à tous les écosystèmes, son exploitation ayant des conséquences catastrophiques à toutes les échelles de vie..voire même des séismes !. Cela est proprement (sans jeu de ...maux!) inadmissible.

N'est-il pas grand temps que l'on ouvre les yeux ?

• notre boulimie énergétique ne peut que nous conduire de simplicité volontaire vers des catastrophes totales et plus on va dans le mur, plus on accélère ! Quel bon sens!( hum!)

• Sommes-nous incapables de changer de système de pensée, de mode de vie ?

• Sommes-nous à ce point prisonniers des systèmes publicitaires nous incitant à une hyperconsommation débile ?

• Sommes-nous à ce point désireux de « posséder »...avec comme seule image et seul but les possessions des plus riches que nous, et cela à chaque niveau de la société ? (lire Veblen : « théorie de la classe de loisirs » et plus récemment « Comment les riches détruisent la planète » Hervé Kempf). Si la réponse est « oui » aux trois questions précédentes..alors la « bête » est bien malade..irrémédiablement !

• Un point de « croa croa...ssance » (et il faut voir ce que ce terme recouvre!!! - c'est la nature qui vient de parler!!!) ne permet la création que d' environ 45000 emplois...Sans commentaire. N'est-il pas temps que l'on se botte le c... une bonne fois pour toute et que l'on prenne des décisions courageuses en évitant de penser systématiquement aux prochaines échéances électorales ?

• Vive la vraie démocratie. Une utopie ?

En ce qui concerne les gaz de schistes, je ressens cela comme un quasi ultime effort désespéré ( comme la « croissance verte!!!) pour maintenir notre folie actuelle...et les revenus des riches. Que chaque « complice » de cela (chacun d'entre nous?) se regarde dans un miroir, en toute conscience et se pose la question : « et moi, est-ce que je contribue à tout cela.. ? »..puis décide simplement de réduire sa consommation propre d'un facteur adapté.. .

La source gaz de schistes apparaît donc comme une parcelle bien intégrée d'un problème de fond bien plus vaste : notre avenir et celui de nos enfants...Pour eux nous n'avons pas le droit moral ni de lancer d'immenses chantiers (pour sauver une apparence d'emplois) qui les endetteront considérablement, ni de saccager la nature : nous en faisons partie, soyons en responsables !

En conséquence je vous PROPOSE, à vous tous, adhérents d'associations, bénévoles, particuliers qui désirez réfléchir ET agir....., de nous REGROUPER sous un label fédérateur de simplicité volontaire: tous unis nous serons enfin une force que l'on écoutera...sans sourire et mettre au panier (parfois?) les volontés du peuple exprimées, par exemple, dans les enquêtes d'utilité publique. On a assez joué avec nous !

Pourrait-on prendre contact et fixer des dates de rencontre ? MERCI

B Masson, président du CERRF

Pour ceux qui n'auraient pas vu le film Gasland qui relate l'exploitation actuelle aux USA et au Canada, il est disponible en version longue sur viméo -> Suivez le lien !(Version anglaise, sur vimeo en fouillant un peu on peut normalement la trouver en sous titré français, version vostfr souvent censurée et supprimé des sites de vidéos en ligne).

Gasland (ici)